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Reportage : La difficile vie des étudiants algériens à Nice (France)
La vie étudiante en France est très chère notamment pour les nouveaux étudiants étrangers. Pour les algériens, elle est tout simplement synonyme d’une aventure "ardue". À peine arrivés, ils commencent déjà à compter sur leurs doigts le budget qui leur reste. Nous avons rencontré quelques étudiants qui nous ont expliqué et exposé leurs principales entraves. Ils nous dévoilent ainsi leurs calculs pour dépasser ce cap.
Le nombre d’étudiants algériens arrivés en France a explosé cette année et le trait commun de leurs difficultés : les moyens financiers. Certes, il est très difficile de réunir une somme d’argent et venir étudier à sa guise. En l'absence d'un emploi stable, elle relève d'une sacrée aventure avec tous les risques possibles.
Il y a un fait d'abord à souligner ces étudiants n'ont aucune bourse de l’État algérien. Aussi pour venir étudier en France, ils ont dû justifier leurs moyens financiers. Ils devraient être en possession au moins d’une somme de 7 000 euros, équivalente à 1 260 000 DA. Un montant qui n’est pas à la portée de la plupart des étudiants. Nombre que nous avons rencontré ont dû travailler dur pour réunir le pécule pour venir en France.
Une fois le visa décorché, l’étudiant débarque dans un pays qu’il n’avait pas imaginé. Et de plus avec un budget limité. Au lendemain de son arrivée, le climat change. Ne trouvant personne pour l’héberger, il stresse. Il passe son temps d’un hôtel à un autre, toujours moins cher. Son premier souci est l’inscription. Il plonge ultérieurement dans le monde administratif complètement déconcertant. De l’ouverture d’un compte bancaire qui est compliquée cette année — jusqu’au dossier de demande de titre de séjour en passant par d’autres dossiers tels que la demande d’hébergement, Sécurité sociale, etc. Un maquis quoi !
L’hébergement, une étape vitale mais ardue
Le premier mois est très préoccupant. Il faut, en plus de ça, assister aux cours. Il est difficile de tenir. Yanis est arrivé en 2015. Il dit avoir été contraint de réserver une chambre dans un hôtel pour deux semaines. "J’ai payé ma chambre à 500 € pour une quinzaine de jours. Je ne connaissais personne à Nice. Je n’ai quitté l’hôtel que lorsque j’ai trouvé une colocation. C’était dur. J’ai dépensé tout mon argent avant que je m’inscrive", nous raconte-il.
La recherche d’un logement est une autre étape difficile. Le loyer est cher : 550 € pour 20 m². L’une des annonces que nous avons trouvées à la faculté des lettres de Nice Sophia Antipolis propose une chambre de 10 m² à 490 € avec 55 € de charges. Pour louer, le propriétaire exige certaines démarches coûteuses : le garant, la caution de deux mois et le payement du premier mois. L’étudiant doit avancer deux mois de loyer et une caution avancée. Ce qui fait un total de 1 500 €. Avec les frais d’inscription et les démarches administratives, il ne restera pas trop de sou pour se permettre une location individuelle. Il faut donc chercher d’abord un colocataire. Pas mince l'affaire ! Il faut choisir une personne avec qui s’entendre. Mais, à l’étranger, on n’a pas trop le choix. Il faut patienter et s’entre'aider.
Au final les étudiants arrivent quand même à se loger. Pas tous à la fois, mais ils réussissent à se connaître grâce aux réseaux sociaux et à l’aide d’anciens étudiants déjà établis.
Assia et Tinehinane ont pu se rencontrer et louer un studio à 520 € le mois avec charges comprises. Ce qui leur a permis de partager les frais du loyer. "Ça fait maintenant un mois que nous louons ensemble et c’est une très belle chose. Nous partageons même les provisions", déclare Tina, visiblement contente. Et d’avancer : "Nous avons déposé nos demandes de cartes de séjour et nous attendons. Au même temps que nos études, nous cherchons du boulot".
À noter que les étudiants ont droit à l’aide au logement (APL). Pour cela ils fournissent les pièces nécessaires accompagnées du dossier, mais ne seront remboursés qu’une fois le titre de séjour attribué. À compter deux mois ou plus. C'est dire que la patience est une règle d'or.
Les plus chanceux sont les étudiants qui ont bénéficié d’une chambre dans une résidence universitaire auprès du CROUS (Centre régional des œuvres universitaires). Ceux-ci auront onvoyé leur demande d’hébergement sur le site Internet. La suite de la démarche est complétée une fois arrivé sur place. "J’ai demandé une chambre sur le site du CROUS, en arrivant ici, j’ai payé ma chambre dont j’ai bénéficié et tout est réglé", raconte Amina.
Le job étudiant, un autre embarras que Yacine nous expose
Yacine est un étudiant algérien arrivé à Nice en 2015. Il n’avait que 1700 euros à son arrivée. Quelques mois après son installation, à l’instar d’autres étudiants, il épuise son budget. En l’absence d’une bourse d’études, il est obligé de chercher un emploi à temps partiel pour financer ses études. Un autre embarras qui l’a obligé à sacrifier une année d’études. "J’ai dû m’absenter plusieurs fois aux cours pour chercher du travail. Résultat : je n’ai pas validé mon Master", concède-t-il.
Certains étudiants réussissent à trouver un job au CROUS comme polyvalent de restauration. C’est le cas de Chihab, un étudiant en information et communication. Arrivé en 2016, il n’a jamais trouvé de travail, mais s’est contenté de quelques vacations d’arbitrage de matchs dans la région des Alpes Maritimes. Cette année, il travaille "au CROUS à mi-temps", nous dit-il.
D’autres sont parfois obligés de sacrifier leurs études et changer de ville. "J’ai beau chercher un job étudiant. Pourtant, j’ai eu plusieurs entretiens avec des entreprises qui ne m’ont pas recruté. Le statut d’un étudiant algérien est particulier, voire compliqué. Dès qu’on découvre qu’on est algérien, on ne nous recrute pas", avance notre interlocuteur, Yacine.
La vie économique commence à renouer pendant la saison estivale à Nice. C’est la seule période qui offre plus de chances de recrutement avec des jobs dans la restauration notamment. Certes, les étudiants ne sont déclarés que 20 heures par semaine, mais trouvent souvent un deuxième emploi. "Parfois on tombe sur un employeur compréhensif qui nous laisse travailler à temps plein. On lui explique qu’on n’a pas déjà travaillé durant l’année et qu’on n’a pas épuisé notre quota d’heures (900 heures).
Ça m’a permis en effet de travailler durant toute la saison estivale à temps plein. Comme ça, j’assure ma rentrée universitaire. À la fin de la saison, le taux de chance de trouver un job baisse. Pour moi, il y a toujours des solutions. J’ai fait une formation d’agent de prévention et de sécurité (APS), le secteur qui offre plus de chance. Je travaille quand je veux et c’est moi qui propose mes disponibilités, selon mon emploi du temps scolaire. De plus, j’ai décroché plusieurs postes d’emploi dans des boutiques comme vendeur, dans des hôtels comme réceptionniste, agent d’accueil ou vigile au Festival de Cannes. Il ne faut jamais dire qu’il n’y a pas de boulot. Les portes s’ouvrent souvent et les chances se multiplient au fur et à mesure", raconte encore Yacine.
Pourquoi on ne nous recrute pas ?
Trouver un emploi peut être difficile et parfois long. Chaque organisme mène sa politique de recrutement. Les employeurs organisent des entretiens au cas où le CV a attiré leur attention. On a donc intérêt à bien rédiger celui-ci. Mais, il y a souvent un obstacle : le fait d’être étudiant et "algérien". "Déjà en tant qu’étudiant on n’a pas le droit à plus de 18 heures/semaine de travail. Et pour la nationalité, on sait bien que les accords franco-algériens ne nous permettent pas de travailler plus que 18 heures par semaine. De plus, on serait obligé de fournir une autorisation d’emploi, qu’on ne peut recevoir qu’après deux semaines ou plus. Durant ce temps, le poste serait déjà pris.
Personnellement, je ne l’ai jamais faite depuis mon arrivée en France. Aucun employeur ne me l’a demandé. Parfois, je fournis une déclaration sur l’honneur dans laquelle je précise le taux d’heures de travail que j’ai fait. L’honnêteté est la meilleure porte de la réussite. Les bosses aiment voir leurs employés motivés et surtout ponctuels. Une fois avoir gagné la confiance des employeurs, on saura leur proposer d’autres employés."
Mounir Outemzabt / Le Matin
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